lundi 24 novembre 2008
Le PS réinvente la démocratie. Si!
Quand on tient presque instinctivement les militants de toutes sortes en grand mépris, ou quand ce mépris est étayé par une fréquentation et une connaissance bien concrètes, il y a une jubilation précieuse à les voir se comporter au grand jour selon leur propre nature, c'est-à-dire EXACTEMENT A L’INVERSE DE LEURS HABITUELS BONIMENTS.
Les militants politiques sont, chacun le constate, parfaitement infréquentables. Il suffit d’en inviter deux à une soirée merguez pour les voir transformer l’innocente sauterie en une joute plombante, en combat pour la paix dans le monde, fût-ce au prix d’un pugilat ! Car c’est une constante facile à vérifier : les militants du droit à la vie sont prêts à tuer pour le défendre, ceux qui veulent abolir la violence exigent les plus lourdes peines contre les méchants, d’autres aiment tant les ours et la nature qu’ils n’hésitent pas à déporter artificiellement de paisibles plantigrades au milieu de notre réseau routier, certains s’enrichissent en prônant à la fois la générosité et l’entraide, des défenseurs du « droit à la différence » interdisent le tchador, des féministes battent leur femme, des militants pour la paix réclament des interventions armées ici ou là, et la liste des paradoxes qu’ils nous servent serait infinie. Le militant, version laïque du croyant, préfèrera toujours sa cause à la vérité, surtout quand la vérité semble lui dire merde. Et son caractère réellement original, ce qui n’appartient qu’à lui dans le règne humain, c’est sa capacité supérieure à s’accommoder de tout ça en toute bonne conscience.
A longueur d’années, n’avons–nous pas entendu que le parti socialiste défendait la démocratie (que personne n’attaque par ailleurs), qu’il luttait pour la justice, pour la tolérance, pour le droit, l’équitation ou l équité, la dignité des femmes, pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, pour la moralité politique et d’une manière générale qu’il se levait contre tout ce que les méchants adorent ? Et le parti socialiste, bordel, c’est aussi des militants ! Des femmezédézoms qui combattent quotidiennement pour défendre ces valeurs de progrès, amen. Et que voit-on ? Ces démocrates auto klaxonnés qui bourrent des urnes, comme de vulgaires chefs de clan corses, ces grenouilles de vertu qui falsifient les décomptes, qui empêchent leurs adversaires de surveiller les votes, qui font voter les défunts etc. Qu’on ne s’y trompe pas : leurs magouilles ne signifient pas qu’ils souhaiteraient qu’on abolisse les élections. Non ! Ce sont des démocrates, ils sont convaincus des bienfaits du vote libre, mais plus encore convaincus d’avoir raison contre la majorité, quelle qu’elle soit. Pour leur image de soi, les militants ont besoin de cette mascarade pluralisto démocratico libre, qui les distinguent utilement des partis stalinoïdes. En revanche, ils veulent bien être démocrates mais gueuleraient comme des putois si un vote leur était contraire. Le grand problème de la démocratie, en effet, c’est quand les cons qui pensent pas comme nous se mettent à voter.
Si le militant politique est facilement enclin à voir la paille du curé tripoteur d’élèves, par exemple, il remarque rarement la poutre de la tricherie au vote démocratique qui lui enfle pourtant le bénouze à la face du monde. L’un fait vœu de chasteté et n’est pas capable de l’assumer ; l’autre fulmine contre les injustices et ne sait pas faire autre chose quand son intérêt est en jeu. La seule différence qui donne encore une sorte d’ « avantage » au curé, c’est qu’une fois pris la main dans la culotte d’un autre, il ferme sa gueule et ne la ramène plus. Le militant, si, toujours. Il est fait comme ça.
Le problème n’est pas qu’il y ait plusieurs « tendances » dans tel ou tel parti politique. Il n’est pas non plus que telle ou telle personne nourrisse des ambitions très personnelles et se batte pour elles. Mais que des militants donneurs de leçons à longueur de temps (et des responsables au plus haut niveau) se fassent prendre la main dans la boîte à sucre, c’est non seulement drôle, c’est nos seulement édifiant, mais c’est presque trop beau.