vendredi 9 octobre 2009
L'ultime spectacle de Zangô Tralpak - 1/8
« ... Page culturelle maintenant avec ce soir la première d’une pièce dont tout le monde parle : l’Ultime spectacle, de Zangô Tralpak. Zangô Tralpak, vous vous en souvenez tous, est ce pluriartiste hors normes qui travaille depuis presque vingt ans à dynamiter ce qui reste encore debout dans notre société, que ce soit l’art, la morale ou la philosophie, la culture, le sport, enfin en règle générale tout ce qui compose le monde où nous vivons. Il se fit connaître avec les concerts qu’il donna à partir de 1982, au cours desquels les instruments de musique étaient détruits d’une manière industrielle, leurs sons étant remplacés au cours du concert par les hurlements des machines en train de les démolir. Son tube la Danse des copeaux fut enregistré au cours d’un de ces spectacles où seize flûtes et deux contrebasses furent passées dans des machines à bois, scie à ruban, raboteuse etc., pour être transformées en allumettes. A la fin du concert, et cela marqua les esprits, les allumettes furent utilisées comme il se doit, et les spectateurs émerveillés durent s’enfuir de la salle in extremis pour échapper aux flammes de l’incendie. Zangô Tralpak fut condamné à deux ans de prison pour mise en danger de la vie d’autrui.
On aurait pu s’attendre à ce qu’il s’acharne à détruire l’institution carcérale de l’intérieur, mais il n’en fit rien. Il surprit tout le monde en profitant de l’oisiveté forcée pour s’entraîner au tennis de table avec ses codétenus. Là encore, il fit œuvre de révolutionnaire en tenant sa raquette d’une manière incroyable : fixée entre ses jambes comme un sexe. Son jeu, fait d’invraisemblables mouvements de bassin dans toutes les directions, surprit tellement ses adversaires et se révéla si efficace qu’il devint champion du monde dès sa sortie de prison. Il expliqua sa démarche lors d’un entretien avec notre collaborateur Henri-Claude Boulay-Clapaou, trois jours avant sa libération anticipée. Je vous propose de réentendre ses paroles: »
- Le sport est un des piliers de notre société compétitive. Il apprend aux enfants le machisme initial des règles de la vie en communauté, même quand ces enfants sportifs sont des filles. Les femmes sportives, les championnes sont l’image la plus accomplie du triomphe de l’homme. La rage qu’elles mettent dans l’entraînement et l’ivresse d’avoir vaincu leurs adversaires-ennemies sont la traduction moderne de la prééminence du fort sur le faible. Le sport est ce qui nous reste du fascisme, comme la poupe non-immergée d’un bateau qui repose sur le fond d’un lac. En gagnant ce championnat du monde, je viens de démontrer que l’essence du sport se situe dans la sexualité, donc dans des rapports de dominant à dominé, dans la zone primaire où les individus jouent leur survie à travers l’espèce. J’ai battu les autres en jouant avant tout avec ma bite, c’est-à-dire que ma raquette, placée comme vous l’avez vue, était le prolongement le plus direct de mon sexe, le plus court chemin possible entre lui et la balle. Je suis persuadé que j’aurais gagné encore plus facilement si j’avais pu jouer directement avec mon gland, mais il aurait bien sûr fallu pour cela que je fasse transformer par chirurgie son bombé en une surface plate pouvant renvoyer les coups de l’adversaire. Dorénavant, personne ne pourra plus jamais jouer comme on le faisait jusqu’à moi.
« Hum...revenons donc à son actualité, sa pièce, Ultime spectacle comme il l’a intitulée. Dans le but de surprendre la critique, Zangô Tralpak refuse de donner le moindre indice sur la teneur de sa pièce. Certaines indiscrétions laissent supposer que la violence y sera omniprésente, et cela ne surprendra personne. La seule chose que l’on sache, c’est qu’il n’y aura que sept représentations, seulement sept. »
A suivre...