lundi 22 février 2010
Halal limite
J’apprends à l’instant qu’il existe encore des gens (homo sapiens-sapiens) qui continuent de fréquenter les Quick. Il paraît même qu’ils vont y manger, oui. Mon dernier souvenir d’un sandwich Quick doit bien remonter à 1990, et j’ai l’impression qu’en y pensant un peu fort, la diarrhée d’époque reviendrait. C’est ça, Quick, le Quick paradoxe, un truc insignifiant et insipide mais qu’on n’oublie pourtant jamais. Manger chez Quick, c’est comme cueillir une fleur en plastique dans un vieux pot réformé des cimetières. C’est comme faire du bateau dans un égout. C’est comme foutre un quignon rassis dans l’eau de vaisselle en espérant qu’il retrouve sa souplesse perdue. Quick, c’est le désespoir sept jours sur sept. Réponse française à Mac Do, Quick est capable de transformer un authentique patriote en renégat : à l’étranger, on ne compte plus les Français qui se font passer pour Suisses, ou Belges, de peur d’être associés à cet attentat. Il paraît même que certains pays ont tenté de faire condamner la France auprès du tribunal de La Haye, pour mauvais traitement à populations désarmées. Mordre dans un Quick est impossible : tout y est mou, tout colle et s’affaisse comme dans un vieux porno spécial matures XXL. Contrairement à ce qu’on pourrait croire à la première bouchée, Quick ne vend pas de la merde : il rehausse, par comparaison, la merde au rang de mets assez correct, reconnaissons-le. Certains prétendent que les mangeurs de Quick ont moins souvent le cancer que le reste de la population. C’est vrai : la dépression les fait mourir tellement jeunes que le cancer lui-même est sans effet sur eux.
Ceci dit, je suis abasourdi qu’on veuille absolument garantir que tout individu, musulman ou pas, puisse aller y dépenser son fric et sa santé, comme si l'accès au Quick était un droit citoyen de plus. Autant le dire tout de suite, je suis à 100% pour que tous les Quick de France deviennent halal dès demain matin : les musulmans étant très minoritaires en France, le nombre des clients devrait donc mathématiquement diminuer, et tout ce qui peut réduire le nombre des clients de Quick est un bénéfice pour le genre humain.
Depuis les années 50, le quartier de la Guillotière est, à Lyon, un quartier arabe. Avec la mondialisation, des extrêmes orientaux et des Turcs sont venus s’y installer aussi mais la population arabe, comme les commerces du même nom, y restent majoritaires. De nombreuses boucheries sont halal et l’affichent en lettres énormes. Qui aurait le culot de prétendre les obliger à servir du boudin ? Depuis quand les magasins, les restaurants, sont-ils tenus de proposer des produits convenant à tout le monde ? Au nom de quoi une enseigne comme Quick, ou un vrai restau quelconque, devrait-elle se soumettre à une sorte de cahier des charges républicain et laïc ? On nage en pleine fiction.
Le maire de Roubaix a porté plainte contre Quick et j’ai du mal à imaginer qu’il puisse gagner son procès. Mais enfin, nous sommes en France, tout peut arriver. N’étant pas un service public, Quick est libre de décider ce qu’il propose à ses clients, merde ! La preuve : ça fait trente ans qu’il leur propose de la merde, personne ne s’en est offusqué à coups de procès ! Est-ce qu’on va demander à un restau de poissons de servir aussi de la viande parce que des clients viandards seraient discriminés ? A-t-on décidé, dans ce pays qui part en couilles, de détourner le sens de tous les mots ? La discrimination est devenu l’aire de jeu des cancres, qui n’ont aucune idée de ce que le mot désigne précisément. Alors chacun y va de son procès, puisqu’il est établi désormais qu’on ne peut agir les uns sur les autres que par voie de justice, et la moindre « nouveauté » est désignée discriminante avant même qu’elle ait eu le temps de naître.
Bien sûr, il serait peut-être préférable que Quick propose des merdes halal et aussi des merdes pas halal du tout à ses imbéciles de clients. Ce serait ce qu’on appelle une carte plus complète. Mais à ce compte-là, on pourrait exiger (exiger, sous peine de procès) qu’il propose aussi un truc pour les végétariens, les végétaliens, les fétichistes du pied, les bonzes au régime, les rabbins en goguette, les néo mandraquiens (qui ne mangent que des œufs en neige, sauf le jeudi, évidemment), les bourgifissiens orientaux (qui déjeunent de sauterelles revenues dans du beurre de cacahuètes rance, et de pain trop cuit), les vikings mordorés (poissons cru et cervelle d’ennemis), les abstinentistes (qui ne mangent jamais rien, mais exigent qu’on leur serve des assiettes vides trois fois par jour), les enculés mondains (olives bio matin, midi et soir, plus un thé vert) et ma propre grand-mère, qui ne termine jamais sans fromage bleu ! Où s’arrêtera-t-on dans le dirigisme ? Et, n’oublions pas que si un Quick est condamné à proposer du non-halal pour éviter cette putain de discrimination imaginaire, le lendemain matin, des milliers de plaintes seront déposées contre TOUS les restaurants du pays qui ne proposent PAS de bouffe halal ! Réciprocité ! C’est comme si c’était déjà fait.
On nous présente une scène édifiante, un dilemme cornélien : un mec veut se taper un Quick mais ne veut pas manger halal, il erre dans Roubaix à la recherche d’un comptoir ami où il pourra se satisfaire, mais n’en trouve point. Bientôt, acculé par la faim, ce con se jettera sur le cadavre d’un chien pour s’en repaître, sous les regards désapprobateurs des bourgeois repus. C’est atroce. S’il avait profité de la circonstance pour ouvrir les yeux, il se serait rendu compte que Quick vend des trucs immangeables, halal ou pas, et serait simplement allé manger son sandwich à la boulangerie du coin, laissant les halal addicted s’empoisonner le bide à coups d’éponges tièdes parfumées au Viandox.