Les violences conjugales sont un sujet qui revient dans l’actualité assez régulièrement, et assez régulièrement, on constate un manque de clarté et de précision dans les chiffres qui sont annoncés, et qui paraissent chaque fois énormes. En ce moment, une campagne de pub tente de convaincre les femmes victimes de violences, ou les personnes qui en seraient témoins, de réagir. Très bien. Mais nous avons un flou dans les chiffres qui laisse penser qu’on ne prend pas la chose avec tout le sérieux nécessaire. Dans LIBE , nous avons un article relatant cette campagne gouvernementale, et annonçant des chiffres troublants, « Hors ménage, ce sont 260.000 femmes qui ont été victimes de violences sexuelles en 2005 ou 2006, dont 130.000 d'un viol ». 130 000 viols par an (2005 OU 2006, le ou suggérant une constante des chiffres sur ces deux années), ça fait 356 viols par jour en France ! Ça paraît beaucoup, ça paraît énorme… Juste avant, l’article nous dit « En 2005 ou 2006, en France, 65.000 femmes et fillettes ont été mutilées ou menacées de l'être » (je ne sais pas si tu es comme moi, lecteur sensible, mais je ressens toujours un malaise à l’évocation du mot « mutilé ». Ça me semble le comble de la saloperie). Mais ces 65 000 femmes ou fillettes ont-elles été mutilées ou menacées de l’être ? La différence entre les deux choses est tellement considérable que le chiffre, considérable lui aussi, ne signifie ici plus rien. Menacer quelqu’un de lui « couper les couilles si j’t’attrape » n’est quand même pas la même chose que le faire réellement, non ? Et d’ailleurs, la simple « menace » et l’acte lui-même ne seraient pas punis de la même peine devant la justice, ce qui confirme qu’il y a une différence entre dire et faire. CQFD. Le journaliste qui écrit ça est donc un gros feignant.
A cet article curieux fait suite une INTERVIEW de Françoise Brié, de
Tous les « spécialistes » insistent sur ce fait : bien des victimes ne disent pas de ce qui leur est arrivé et ne portent pas plainte. Entre les victimes qui n’en parlent pas et les journalistes qui en parlent n’importe comment… Alors, on pourrait se demander si TOUS les sujets d’actualité sont traités de la même dilettante manière, ou si celui-ci est particulièrement maltraité. Dans le second cas, ça pourrait indiquer que les journalistes se foutent pas mal de la réalité, qu’ils ne vérifient pas ce que disent les « spécialistes », ou que les chiffres sont fantaisistes. En tous cas, il reste à espérer que les gens censés se mobiliser à l’évocation de ce problème n’auront pas un sens critique trop aiguisé…