mardi 23 novembre 2010

Julien Guiomar 1928- 2010


Quand on dit que le cinéma français d’avant-guerre avait connu de grands seconds rôles, on raconte des salades. En réalité, le cinéma français a connu de grands seconds rôles tout au long de son histoire, et jusqu’à aujourd’hui. Jusqu’à hier, précisément : Julien Guiomar vient en effet de mourir, à 82 ans.

Le propre d’un second rôle, en plus d’un indéfinissable talent, c’est de n’avoir pas de nom. Le second rôle, qui est assez souvent un troisième, quatrième ou vingtième rôle, c’est un physique, une voix, c’est une dégaine qu’on reconnaît et qui donne aux films un air familier. Mais le spectateur non spécialiste est généralement infoutu de se rappeler son nom. Qui se souvient de Bussières, de Bernard Musson, de Saturnin Fabre, de Dalio, de Jeanne Fusier-Gir ? Qui se souvient de Julien Guiomar ?

En quoi Julien Guiomar fut-il un « grand » second rôle ? En ceci qu’il avait une tête, un regard, une énergie, un phrasé, un physique, une gestuelle et en un mot un style immédiatement reconnaissables. Il pouvait jouer un colonel dans un film de Costa-Gavras et l’inoubliable Tricatel dans un film de Claude Zidi en conservant sa manière d’être bien à lui qu’on identifiait sans délai. Un style.
Il fut aussi un grand second rôle parce qu’il a rempli avec constance la mission dévolue aux seconds rôles de tous les temps : sauver les navets. C’est sur ce genre d’exploit que se bâtit la reconnaissance du public, qui s’y connaît en navet, et qu’un critique « nouvelle vague » ne pourra jamais comprendre.