samedi 5 janvier 2008

Parti socialiste: les tout-petits, coeurs de cible.

Malgré une enquête scrupuleuse, il n’est pas encore possible d’établir avec certitude qui a eu l’idée du nouveau concept publicitaire du parti socialiste français. Les responsables et les techniciens interrogés restent vagues sur le sujet. Toujours est-il que l’affaire risque de faire jaser. J’explique.

Après la dernière élection présidentielle, il s’est trouvé des gens, à gauche, pour réclamer que le parti socialiste se débaptise, et adopte un nom plus en accord avec ses ambitions. Certains petits malins, à ce sujet, suggérèrent même qu’il n’adoptât pas de nom du tout… Passons. On entendit ici ou là des propositions, principalement orientées vers l’abandon de la référence au socialisme. La socialisation des moyens de production, qui s’en réclame encore ? demanda François Rebsamen, futur homme important de la gauche mondiale. On semblait pencher vers l’allusion « sociale-démocrate », mais la question fut éclipsée au profit de celle, plus importante encore, du maintien du parti en une seule entité ou de son éclatement.

La question de la dénomination n’est pas encore tranchée, et sera peut-être repoussée aux calendes grecques, mais on s’est déjà occupé du logo : on le garde. La rose au poing est comme une marque de fabrique, explique Hubert Blitz-Gemütlich, chargé de com au PS. Des sondages sérieux nous démontrent que l’emblème est « connu et identifié des Français » à 93%, ça vaut tous les discours. Nous avons donc là un véritable capital qu’il convient de gérer avec prudence et respect. Les nouvelles générations aussi y ont droit ! En effet, la campagne socialiste s’occupe des nouvelles générations, en pleine rupture avec les habitudes poussiéreuses. Nous avons décidé d’un partenariat avec un grand fabricant de couches pour bébés (c’est Pampers), en ayant conscience de briser un tabou. Les couches culottes vendues en France seront désormais marquées du célèbre logo du parti socialiste, une Rose Au Poing (Rap, nom de code de l’opération), mais, et je vous prie d’insister sur ceci, sans aucune mention ou référence écrite au parti. Juste le logo.

S'imposer sur le marché de la petite enfance citoyenne...


Michel Rocard, consulté au tout début de l’opération, avait suggéré un message plus complet aux nourrissons : une copie de son discours de politique générale du début 1989, mais il dût se ranger aux arguments contraires : les bébés ne comprendraient pas l’essentiel. Le logo, censé faire appel à une région du cerveau qui ne s’embarrasse pas de détails, agira comme une marque bienfaisante sur les fesses de bébé. Celui-ci s’habituera au voisinage du symbole dès les premières heures, familiarité inconsciente, certes, mais réelle. En les habituant ainsi, on diminue le risque de les voir s’effrayer plus tard quand ils comprendront la chose, nous assure Noémie Moins, responsable du PSB (Parti Socialiste Bébés) en Guyane française, et par ailleurs pédiatre. Comme tous les objets, souvent inutiles, qui se trouvent à portée de sa main, un logo constituera une part de l’environnement de bébé, une chose rassurante qui est là, c’est tout. Les premières années de notre existence sont déterminantes pour notre avenir et donc, dans le cas qui nous occupe, pour la France !

Comme souvent au PS, les langues se délient, surtout les mauvaises. Les couches culottes, c’est fait pour chier dedans ! On n’était pas assez dans la merde, non ? s’étouffe Léon, militant de toujours, rencontré à la pause café. Un camarade plus coopératif, tirant furtivement sur sa clope, ajoute que si les mioches s’habituent à voir partir le logo du parti à la poubelle avec la couche culotte qui le porte pendant leurs jeunes années, ils risquent « de reproduire le schéma dans l’isoloir ». C’est bien connu en analyse comportementale post-traumatique, mais ça, les grosses têtes de la com ne veulent pas l’entendre ! On reconnaît bien la tradition de liberté de parole propre à la gauche française.

Malgré ces mauvais coucheurs (si vous me permettez ce jeu de mots dans une circonstance aussi sérieuse), l’idée semble intéresser, notamment à droite. On a vu Patrick Devedjian dîner avant-hier soir en compagnie de Raoul Farouche, Pdg de Couches Culottes Auchan France, et il n’en a pas fallu plus au député Santini pour lâcher un « On est propres ! » qui en dit long…