mardi 30 décembre 2008

Tout finit par le Bop

L’année 2008 termine son existence comme elle peut. De l’avis général, elle est complètement crevée. Pour que son départ prenne un tour joyeux, gai et bondissant, ce qui ne saurait faire de mal, je propose l’écoute de cette adaptation d’un standard de Charlie Parker, Bloomdido (1953), par André Minvielle, et qui s'appelle "Mme Mimi". André Minvielle chante ici avec la compagnie Lubat, sur l’album Scatrap Jazzcogne, album systématiquement possédé par chaque honnête homme que j’ai rencontré…
Minvielle montre un bel exemple de sa virtuosité, de son sens de la musique autant que celui de la fantaisie. J’ai toujours ressenti une bien plus grande énergie dans le be-bop que dans le punk le plus violent ou le bon gros rock, genres lourds et lents qui n’aspirèrent jamais à la légèreté, il est vrai. Et pour ce qui est de la partie musicale de la chose, je laisse les oreilles se faire un avis… Minvielle montre aussi ce qu’on peut faire de sonore avec la langue française, enfin il propose une piste. Comparé à celui du rappeur standard (agressif, éructant et maniaco allitérant), le flow de Minvielle semble gorgé de jus musical comme une orange, et donne au mot « rythme » une allure soudain moins binaire.
Sur cette version, on trouve Bernard Lubat au clavier, le même Bernard Lubat qui fut l’élève (à la batterie) du grand Kenny Clarke, tout simplement l’un des fondateurs du be-bop, avec Parker et Gillespie. Tradition.
Lecteur curieux, comme je sais que tu voudras savoir si Minvielle dit réellement quelque chose dans son scat phrasé formule 1, je fournis donc les paroles avec...

Mme Mimi (Parker/Minvielle)

Œdipe moi donc, Madame Mimi
Mais comment, dites, comment vous faites
Pour que les syllabes collent sur les notes ?
Comment, mais comment vous faites ?
C’est chouette, hé ! dites-moi tout sec
Moi aussi j’ai envie de scatter sur un petit thème
Et de m’balader le bop et de m’balader le bop

Mais dites- moi donc, Madame Mimi
Mais comment, dites, comment vous faites
Pour que les syllabes collent sur les notes ?
Comment, mais comment vous faites ?
C’est chouette, hé ! dites-moi tout sec
Moi aussi j’ai envie de scatter sur un petit thème
Et de m’balader le bop et de m’balader le bop

Tout’ la nuit j’me suis creusé la tête pour trouver
Ces maudites paroles qui ne sonn’pas, pas, pas !
Pas du tout au tout du tout, quand tout à coup
Un éclair de génie, pas d’Eugénie, me fout droit
Hors du lit, planté dans mes chaussons. Du papier
Une plume pour immortaliser ces pensées !...
Oui ! C’est ça pas de concessions ! Laisse la plume agir
Et glisser sur le papier, sans trop penser c’est bon, bon !
Même si ce n’est pas folichon car l’important
C’est d’essayer de joindre bout à bout
Des mots qui sonnent et qui collent aux notes
Et c’est pas évident !



Pour ceux qui découvriront ce morceau, et qui l’apprécieront, je conseille quand même d’écouter une des versions d’origine, avec Parker à l’alto. En 1953, le be-bop est déjà une histoire un peu ancienne et Bloomdido illustre bien cette maturité du style.
Ultime conseil : le bop réclame un réglage très subtil du son de votre système d’écoute : tout à fond !


Découvrez Charlie Parker!

dimanche 21 décembre 2008

Vichy renoue avec les zeurléplusombres!

Attention, ce qui suit constitue une épreuve pour tous les Ignatius de France, tous les sensibles, tous ceux (et toutes celles) qui souffrent des attaques de la Laideur Grandiose et de l’Infinie Connerie. Par conséquent, si certains ne veulent pas subir une épreuve supplémentaire, qu’ils S’ABSTIENNENT D’ECOUTER CE FICHIER. Après, il sera trop tard !
Gilbert Collard n’est pas seulement un célèbre avocat mal coiffé, c’est aussi quelqu’un qui nourrissait le désir irrépressible de devenir maire de Vichy (oui, tu as bien lu, lecteur, il existe bien des perversions, dont celle-ci). Je dis irrépressible car pour oser faire ce qui suit, il fallait une nécessité absolue, un désir maniaque, un impératif catégorique !
Maestro ?
(les plus endurants d’entre vous, lecteurs, ceux qui écouteront toute la bande, auront la chance, peu avant la fin de l’écoute, d’entendre ce qui risque bien de devenir un moment d’anthologie qu’on se passera de site en site, jusqu’à la fin des temps…)


Merci à CL, honorable correspondant qui a su partager cette intense douleur.

vendredi 19 décembre 2008

Burn before reading

Fucking a...

Les frères Coen comptent parmi les plus épatants cinéastes de notre époque, tout le monde est d’accord là-dessus. Dans la douzaine de films qu’ils ont derrière eux, on ne trouve pas de mauvais film. Certains sont moins bons que d’autres, plusieurs sont des chefs d’œuvre, d’autres sont simplement de très bons films, dont le moins bon de tous serait encore capable de susciter enthousiasme délirant et poussée de chauvinisme s’il avait été pensé et pondu par un cinéaste de chez nous.
Des critiques ont traité par le mépris leur « Ladykillers », coupable probablement de n’être qu’une pure comédie (genre mineur, tout Molière en témoigne). Sous la plume d’un demeuré, j’ai même lu qu’ils avaient, à cette occasion, « touché le fond »… alors qu’on aurait probablement bombardé Chevalier de la Légion d’honneur en moins de trois jours le français capable de s’approcher de ce genre de fond-là. Pour tout dire, je les considère comme de très grands cinéastes, de très grands techniciens, parmi les meilleurs de notre époque, capables de finesse et d’intelligence en conservant une forme populaire, et j’attends toujours leur prochain film avec une impatience fébrile.
Qui se souvient d’Edwin Moses ? C’était un coureur de 400 mètres haies du début des années 80, le meilleur. Sa foulée était unique, surprenante, impériale : entre les haies, il était le seul homme au monde à pouvoir n’en faire que treize, et cet avantage lui permit d’être invaincu pendant près de dix ans. Pourtant, alors que je le pensais tout simplement invincible (j’étais bien jeune), que j’avais toute confiance en lui pour me fournir un modèle héroïque quasi éternel, il fut battu par un dégueulasse un jour de 1987. Il foira. C’est ce qui vient d’arriver aux frères Coen. Burn after reading est à la fois un film des frères Coen ET un film mauvais : en ce sens, il est unique.
L’histoire, on s’en fout. Elle repose sur un quiproquo, le truc le plus vieux et parmi les plus efficaces pour faire marrer les gens, elle n’est pas en cause. Il est totalement inutile de se casser le tronc à chercher une histoire originale ou complexe pour réussir un film : je rappelle que The big Lebowski raconte l’histoire d’un mec à qui on a simplement volé un tapis… Mais Burn after reading est dans une tout autre catégorie, celle des films drôles qui ne font rire personne. Le rythme est atrocement lent : pour une histoire à rebondissements, c’est louche. La mise en place de l’histoire n’en finit pas, on passe des quarts d’heure à enculer les mouches. Le spectateur bienveillant se dit chouette, ils sont en train de me fignoler une histoire de dingue, ils prennent un peu leur temps au début pour me surprendre ensuite, et là, alors, ça va chauffer, hou la la ! Mais le temps passe et rien n’arrive. On attend les répliques qui font mouche, les situations non seulement drôles, mais coeniquement drôles, avec ce style, cette précision, cette cruauté, ce coup d’œil des Coen, et surtout ce rythme habituellement parfait, qui ici est absent. L’humour, c’est de l’intelligence qui a le sens du rythme (©Beboper. Tous droits réservés pour tous pays, y compris le 9-3). C’est ce précieux dosage de retenue, de lenteur et d’accélération immédiate qui surprend, qui révèle ce qui n’apparaissait pas et arrache le rire en un instant, là, paf ! A l’écrit ou à l’oral, il s’agit toujours d’une surprise. Rien n’est plus foireux qu’un truc qu’on « voit venir », qu’on devine. Même si on peut parfois rire par anticipation, si on peut jubiler d’avance, le rire vient pour libérer la tension produite par le changement de rythme, par la surprise, il n’éclate qu’à l’acmée et, pour une fraction de seconde d’inattention, il est réduit à rien. Autour d’une bonne table où l’on parle, où l’on s’apostrophe joyeusement, on rencontre parfois des gens trop hésitants ou trop timides pour dire le mot qu’il faut à l’instant exact où il peut être furieusement drôle et qui s’humilient eux-mêmes en essayant de le placer malgré tout, malgré que le moment soit passé, à contre temps. Comme dans un solo de guitare, ce n’est pas ce qu’on dit qui est en jeu, c’est comment on le dit, sous quel rythme.
Les frangins Coen ont donc (provisoirement) perdu le sens du rythme. Ils ont étalé sur deux plombes une succession de scènes moyennes, sans relief, et ils endorment les salles. Ils ont perdu (provisoirement) ce génie de créer des personnages forts, des rôles d’anthologie - le coiffeur (Barber), la flic enceinte (Fargo), Walter Sobchak (Lebowski), et tant d’autres. Les acteurs eux-mêmes apparaissent tous très en dessous de leur niveau habituel (Brad Pitt n’est pas convaincant, pour la première fois peut-être ; Clooney est insignifiant, Malkovich pue l’esprit de sérieux, Frances Mc Dormand semble avoir été bridée). Certes, l’histoire peut être qualifié de loufoque, et je pressens qu’une foule de ballots vont la décrire comme ça, mais ça ne garantie pas du tout qu’on ne s’y emmerde pas considérablement. L’affaire Clearstream aussi, c’est loufoque, mais ça te fait rire, toi ?

Cagoule Pride Now!


Une belle brochette d'enculés

De l’avis de tous ceux qui me connaissent, je suis un garçon calme, posé, charmant. Jamais un mot plus haut qu’un autre, jamais de geste brusque, un bloc de savoir vivre enrobé de douceur. Même ma mère, qui est l’impartialité personnifiée, le confirmerait. Mais il arrive que les plus flegmatiques champions ne puissent retenir l’émotion, l’incontrôlable pulsion primaire qui mue l’honnête bourgeois en maquisard ou le placide chat de mémé en véritable bête fauve. C’est ce qui m’arrive en ce moment même, et je vous prie de croire que ce n’est pas pour un motif futile. La chose porte sur un mot : « encagoulé ». D’emblée, que ce mot soit laid comme un pou n’échappe à personne. C’est un mot qui insulte aussi bien celui qui le reçoit en pleine oreille que celui qui s’abaisse à le colporter. « Encagoulé » est censé désigner l’individu portant une cagoule mais semble plutôt indiquer que l’individu en question se l’enfonce dans le cul. C’est ce qui explique qu’entendre un journaliste parler « d’individus encagoulés » à sept heures du mat est insupportable.
L’affaire a commencé avec les Corses. Pour être précis, avec les Corses portant ordinairement des cagoules, ce qui ne fait pas une population bien nombreuse, quoi qu’on en pense. J’en ignore la raison, et les historiens du futur ne la découvriront peut-être jamais, mais il y eut un moment de bascule dans l’histoire de l’humanité, un avant et un après séparant la chronologie historique en deux fractions distinctes, celle où l’on disait « cagoulé », et celle où l’on dit « encagoulé ». Soudain, en effet, tous les journalistes francophones du globe se mirent à parler de hordes d’encagoulés corses tenant meeting, de commando encagoulé faisant main basse sur un coffre, de lascars encagoulés agressant des vieilles dames, etc. Le mouton et le journaliste partagent cette passion pour la meute, le geste commun et le bêlement synchrone, mais ils se distinguent au moins sur un point : le mouton sait d’expérience qu’un homme portant une cagoule est simplement dit cagoulé. Les Corses ayant quelques dispositions pour occuper périodiquement l’attention des médias, il y eut donc un temps où l’on se mit à ne plus parler que de gens "encagoulés", probablement dans un but de moquerie. Pourquoi pas ? Le rédacteur de billets encagouleurs en poste à Paris pouvait bien tenter de ridiculiser des gens armés de Kalachnikov dans un maquis perdu à l’autre bout du pays en grimant ce mot en galéjade pagnolesque : le courage ne manque jamais aux braves. Mais qui, faisant le premier cette farce langagière, aurait pu imaginer le succès de sa vanne, succès non seulement immédiat mais total, totalisant, totalifiant, entotalisé ? On ne trouve plus personne, en effet, pour résister à l’épidémie encagoulifère.
Il faudrait un athlète, ou un Ignatius opiniâtre, pour recenser tous les abus de langage de la junte journalistique, et ses impayables tics. Ce héros pourrait sûrement en dégager des enseignements sur la psychologie de ces sauveurs de démocratie en danger, ces rebelles à la censure, ces esprits forts et libres qui passent pourtant leur temps à s’engouffrer comme un seul homme dans la mode jargonnante et le gimmick branché de mes couilles, qui suivent les plus incontestables conneries dans la plus parfaite docilité. On se souvient de cet autre moment d’intense souffrance où trois cents fois par jour était répété sur les ondes le mot « marigot », après une initiative de Philippe Seguin, si ma mémoire est juste. Pourquoi Marigot ? Mystère. Et le fameux « grain à moudre », combien de silos de farine a-t-il généré ? et le funeste « détricotage », de quel connard sortait-il ? Et cette immonde « cour des grands », qui a régné sur les langues pendant plusieurs années, dans la plus inexplicable impunité ?
Pour le cas « encagoulé », c’est encore plus difficile à admettre. Si les journalistes à l’origine de l’affaire voulaient dire « enculés » à la place d’« encagoulé », et si les discours sur le l’audace journalistique ne sont pas de pure fiction, ils auraient dû oser le coup carrément. Les nervis corses savent sûrement apprécier le courage quand on le brandit fièrement… Au lieu de ça, ils ont trouvé ce pitoyable ersatz que d’immenses cons se refilent par paquets de douze à longueur de pages, au point qu’on se demande s’il existe encore un homme en France qui se souvienne du mot correct ! Profitant donc de l’audience mondiale de ce blog, je le proclame donc ici pour la première et dernière fois : tout connard employant le mot « encagoulé », même pour rire, doit être considéré comme un hors-la-loi, et doit immédiatement être balancé aux flics !

vendredi 12 décembre 2008

Betty tourne la page.



Betty Page, les hommes de cette planète te tirent un dernier coup de chapeau, et leurs mains droites te disent merci.

Betty Page, décédée à 85 ans ce 11 décembre 2008, chienne de vie.

jeudi 11 décembre 2008

La place des nazes

Santini: une tête bien pleine.

Il est de tradition, quand un fâcheux prétend que « c’était mieux avant », de rigoler de sa bêtise, et de son culot d’exister. Quiconque avance que quoi que ce soit ait pu être « mieux avant » passe immédiatement pour un vieux con, c’est une expérience que je ne tenterai donc pas (et si je dis : le cinéma muet c’était mieux avant, se trouvera-t-il encore un rebelle pour asséner que je radote, et que le muet d’aujourd’hui est bien plus silencieux que du temps de Pickford ? OK, je m’écrase.)
Depuis tout petit, j’entends dire que la culture générale est une des variables fondamentales pour distinguer le gentleman de la brute épaisse. Enfin, les sociologues et autres diplômés en sciences du langage ne le disent pas comme moi, naturellement, puisqu’ils sont cultivés. Tout le monde semble parfaitement d’accord pour estimer qu’on a trop donné d’importance relative aux mathématiques dans l’enseignement primaire et secondaire, et que le recul de l’enseignement du français est une erreur qu’on fait payer aux générations qui viennent. Il y a quelques années, on a même prétendu qu’entre deux personnes de bon niveau, également diplômées, la différence se faisait souvent grâce à la culture générale, celle qui, par les nombreux repères qu’elle met à disposition de celui qui la possède, permet de mieux apprécier certaines situations, de mieux s’adapter, d’avoir une vision plus ample, etc. Balivernes ! Tissus de mensonges ! La culture générale, c’est juste bon à créer de L’INEGALITE ! (brrr)
Cette Révélation est d’origine gouvernementale, c'est-à-dire que les conséquences sur notre dos ne vont pas tarder à se faire sentir. Deux EDMF (experts de mes fesses) ont torché un rapport vite fait au ministre, après que celui-ci leur a bien expliqué ce qu’il fallait qu’il comporte, et nous voilà partis pour faire baisser encore le niveau de culture générale dans les concours administratifs. C’est André Santini (secrétaire d’Etat aux fautes d’orthographe) qui en a après la culture générale, et on le comprend bien. Il s’est avisé que les concours administratifs donnaient une part trop grande à la culture générale, au détriment de… de quoi, au fait ? Oui, le problème est cornélien : des thésards en physique se présentent à des concours de catégorie C (niveau CAP/BEP) parce qu’ils ne trouvent rien d’autre et ont légèrement tendance à mieux y réussir que les titulaires de CAP ; le nombre des candidats aux différents concours est en augmentation permanente et la tendance, pour les départager, a été d’élever le niveau des questions. Fallait-il l’abaisser ? Peut-être : si on posait des questions vraiment débiles à une grosse tête, il serait aussi désavantagé qu’un con à qui tu demandes d’expliquer la dialectique hégélienne, logique ! En clair, il est prévisible qu’il faudra bientôt arrêter de lire trop de livres si on ne veut pas se retrouver tricard aux concours des PTT.
L'élite pour tous!

Par quoi remplacer les questions de culture générale ? J’ai une proposition : le bras de fer ! On verra bien si les bons élèves (abominables privilégiés) et les gens cultivés sauront se débrouiller entre les paluches aguerries d’un vigoureux cancre. On va rire. Evidemment, l’option « bras de fer » risque de défavoriser nos amies les femmes, qui ont droit au respect comme tout le monde, et qu’on ne voudrait surtout pas ostraciser. Mais le fait qu’elles soient généralement plus diplômées que les hommes indiquent qu’elles ont déjà dû prendre leur part du gâteau administratif, et qu’elles ne verront pas de mal à ce que les choses changent un peu. Du reste, il est parfaitement envisageable d’appliquer l’option « discrimination positive » à l’option « bras de fer » en organisant des concours réservés aux dames. Si ces deux options cumulées ne suffisaient pas à ce que TOUTES les parties de la population soient représentées dans l’Administration en proportion de leur poids dans la société (la ménagère télédépendante, par exemple), une « option télé » serait profitablement mise en place. Quelques questions bien senties sur Derrick, sur la Nouvelle Star ou sur les présentatrices de la météo, et on verra bien la tête qu’il fera, le je-sais-tout qui passe son temps à bouquiner des livres ousqu’y a pas d’images dedans !
Tout le monde a forcément eu affaire à un fonctionnaire un jour ou l’autre. Loin de l’idée de me moquer bêtement de l’Administration, on a quand même du mal à croire que le recrutement s’y fasse sous la loi de l’élitisme le plus absolutiste ! Hé bien c’est encore trop pour monsieur Santini… A la France de « l’élite », il veut substituer la France des têtes de nœud. Comme dit ma boulangère, c'est un choix.
Mais halte à la raillerie ! Il est parfaitement logique, cohérent, normal, honnête ! que la France cherche à fournir des débouchés aux recalés de l’école, aux clampins du fond de la classe qui en savent long sur le dernier gel capillaire des jeunes, le portable de sa race qui tue et le salaire de Thierry Henri : on n’a pas lésiné sur les moyens du décervelage : maintenant, il faut assumer.

lundi 8 décembre 2008

Bientôt, les Marianiches fiscales !


Philippe Mariani: une autre Bourse est possible!

En France, on connaissait les anarchistes appointés par l’Etat, les intermittents de la révolte inscrits aux caisses d’assurance, on avait des révolutionnaires fonctionnarisés, des rebelles sous statut et des combattants clandestins défilant contre les violences policières. Dans cette aire de jeux qu’est devenue la France, il manquait la catégorie des ultra libéraux garantis par l’Etat : c’est en train de se faire.
Un certain Philippe Mariani, député UMP de l’Oise, propose un amendement au projet de budget 2009 : permettre aux gens qui ont perdu du fric à la Bourse de déduire leurs pertes (dans la limite de 10 700 euros) de leur revenu imposable. Non seulement le boursicoteur est à l’origine, par son action et son existence mêmes, de la crise qui nous plombe, mais il faudrait que l’Etat lui fasse cadeau d’une partie de ses impôts, au motif que cette fois-ci, il a perdu du blé dans l’opération ! Les tenants de l’esprit d’entreprise, de l’entreprenariat conquérant, de l’audace, de la conquête-de-nouveaux-marchés, du courage-merde ! sont désormais sensibles à la sécurité dispensée par l’Etat, dans ce qu’il a de plus représentatif de sa Mansuétude : les exonérations fiscales. On aura tout vu ! Le mot « précaution », mot intrinsèquement sympathique, qui supposait encore la prise en compte individuelle des risques et des avantages, qui ne signifiait pas du tout l’annihilation des risques ou de l’incertitude mais bien leur connaissance, maintenant associé à celui de « principe » est devenu cette bouffonnerie, cet engluant mensonge prostitué à tous ceux qui ont bien compris que d’autres pouvaient toujours payer à leur place, en toutes circonstances. Le principe de précaution est donc en passe d’étendre sa maternelle protection aux fers de lance de l’économie virtuelle financiarisée. Pourquoi s’en priveraient-ils, d’ailleurs, dans cette époque qui pond de l’oxymore comme d’autres accouchaient de révolutions : en avant pour le risque sûr, la conquête donnée, l’aventure pépère ! En route pour le Principe de Certitude ! « Vous avez de l’argent ? devenez gagnant-gagnant ! »
Philippe Mariani est un imbécile dans l’exacte mesure où il croit que nous le sommes aussi. Il prétend que cette mesure n’a pas été chiffrée, mais qu’il ne s’agit pas « d’une très grosse mesure ». Il a passé du temps au ministère du budget pour faire passer sa pilule mais voudrait nous faire croire qu’on décide d’une déduction fiscale, surtout en ce moment, surtout après ses propres prévisions catastrophiques, sans en connaître la portée. Ben voyons… Je n’ai rien contre les classes moyennes, ni contre les gens qui ont mis du pèze de côté et tentent de le faire fructifier. La Bourse existe, on peut y investir son pognon librement, en gagner ou en perdre, comme au casino, et il existe déjà des moyens de limiter les risques (Sicav, par exemple)… en limitant aussi les chances de gagner beaucoup, pardi. Mais on sait ce que sont les recettes fiscales de l’Etat : quand on en perd d’un côté, on se débrouille pour en récupérer ailleurs. Ce cadeau aux boursicoteurs sera payé par d’autres, tous ces cons qui ne perdent pas leur pognon en vendant au mauvais moment, ou ces plus cons encore, les handicapés du niveau de vie, les tarés du Revenu, tout juste capables de ne pas crever de faim, les salariés qu’on va foutre dehors bientôt et qui n’osent pas exiger un principe de précaution taillé à leur mesure.
J’ai la douleur de conclure que Michel Audiard s’est trompé : les cons, ça n’ose pas tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît.

vendredi 5 décembre 2008

"La porte dans la gueule"

La scène se passe il y a des millénaires, au milieu des années 70. Du grand banditisme, de l’action, des coups de feu, du rififi à Pantruche… Jacques Mesrine et ses complices s’évadent de la rate où ils s’ennuyaient ferme et débaroulent sur la voie publique, flingues en pognes ! Ils arrêtent un père de famille passant là en bagnole et, sous la menace de leurs brélicas, lui étouffent sa chiotte ! Ouch !
Quelques instants après, la presse tend un micro sous le tarbouif du gonze, encore chaud de sa rencontre avec la Mort. C’est là ousque j’voulais en venir.
Petite illustration d’un parler populaire savoureux, d’une façon d’illustrer les choses qui n’était donc pas uniquement réservée à Michel Audiard. Ce type vient de se faire braqueman par Mesrine en cavale urgente, et voyez un peu cette tenue, cette classe, ce total dédain pour les cellules de soutien psychologique, dont on comprend qu’elles n’existaient pas à l’époque : c’était avant l’Age des Larmes.
On regrette de ne pas avoir l’ensemble de l’interview...

jeudi 4 décembre 2008

Eric Zemmour n'existe pas !


Cet individu n'est pas scientifique!

Malgré l’incertitude qui caractérise toutes les opinions humaines, il est possible de penser qu’Eric Zemmour est un con. La part de vrai contenue dans cette affirmation est probablement forte, mais pas totale : comme chacun de nous, Eric Zemmour est plus ou moins con.
Quand il forme le projet de prendre le contre-pied des tartineurs de bons sentiments médiatiques (que leur fréquentation permet la plupart du temps de classer dans la catégorie des faux culs), il a raison. Quand il aspire à se battre contre les icônes du Bien, quand il veut débusquer la sottise conformiste planquée sous les discours convenus, le plus souvent rebelloïdes d’ailleurs, il a raison. Mais ça ne le met pas à l’abri de la connerie. Comme lorsqu’il s’est frité avec Augustin Legrand (pourquoi pas) en s’en prenant aux SDF eux-mêmes. Il était peut-être excédé que la France entière fasse une statue de saint laïc à Legrand (jalousie ? envie ?), ou que ce dernier passe pour moralisateur (et lui, ne l’est-il pas ?), mais il s’est trompé de cible. Les gens qui dorment dans la rue ne le font pas pour poser au rebelle, ni parce que c’est cool. Ils sont dans la merde et, à part quelques punks à chiens englués dans le romantisme antisocial, ils aspirent à en sortir. Les mépriser parce que Legrand les défend, c’est un peu comme si on s’attaquait aux femmes battues au simple prétexte qu’elles sont défendues, représentées voire « sanctifiées » par un type qu’on n’aime pas. C’est con.
En ce moment, Zemmour est emmerdé par une affaire de vocabulaire. Qui a dit que les Français ne s’intéressaient plus à leur langue ? Quel est cet autiste ? Le mot en question, on le devine, est le mot « race ». L’existence de Zemmour, son opinion sur la chose et ce qu’il en dit ne change rien à la question de savoir si oui ou non il y a des races humaines. Comme toute chose, si les races humaines existent dans les faits, il suffit d’en démontrer l’existence. Or il est facile de démontrer qu’il existe des êtres humains noirs, d’autres jaunes, d’autres blancs, etc. mais il est beaucoup plus compliqué de se satisfaire du mot « race » pour les regrouper. Pourquoi ? J’essplique.
Tout le monde sait ce qu’est un phénotype (mais je précise quand même) : ce sont les caractères morphologiques et anatomiques d’un individu, en gros, c’est l’apparence de quelqu’un. Quand on dit qu’un mec est noir ou blanc, on n’a rien fait d’autre que constater son phénotype. Mais des Noirs et des Blancs, il en existe beaucoup de variétés : quoi de commun entre James Brown et Naomi Campbell, entre Hulk Hogan et Gandhi ? Dur à dire. La chose qui peut paraître la plus formidable, devant ce débat passionné où l’on veut convoquer les Tribunaux, le Droit et le Cachot, c’est qu’on s’acharne à se crêper le chignon sur une broutille. Une broutille, oui. Quand on dit « race noire » ou « race blanche », on ne fait, après tout, que désigner la couleur de la peau, c'est-à-dire ce qui se voit d’emblée, même si on est nul en maths, même si on ne sait pas lire, même si on est aux Jeunesses UMP! Quel intérêt en retire-t-on ? S’il y avait encore une seule personne pour prétendre que les « races » sont inégales entre elles, ou plus précisément qu’appartenir à l’une d’entre elles déterminerait non seulement un phénotype mais aussi des comportements, des aptitudes morales ou intellectuelles, des compétences, un psychisme, etc. l’usage du mot « race » serait justifié. Mais puisque personne, ni Zemmour ni un autre, ne vient jamais prétendre ça dans le débat public, puisque tout le monde convient que les différences s’arrêtent au phénotype, c'est-à-dire à l’apparence, au physique et qu’on ne peut rien déduire d’elle au sujet du potentiel intellectuel d’un individu, pourquoi se cabrer autour de ce mot ? Je précise que cette remarque devrait valoir autant pour les fanas du mot « race », que pour ses adversaires. Si le mot ne désigne rien d’autre que l’apparence (et bien imparfaitement, d’ailleurs), il perd à la fois son intérêt (en effet, pourquoi l’apparence serait-elle un critère plus important qu’un autre ?) et son potentiel scandaleux (puisqu’en parlant d’apparence, on ne déduit rien des capacités et qualités de l’individu désigné, on ne le situe pas dans une hypothétique hiérarchie).
On se cabre sur des mots. Personne, dans ce genre de débat affligeant, n’est à l’abri de ce qu’il reproche à l’adversaire. Quand on reproche à Zemmour d’utiliser un concept n’ayant aucun fondement scientifique, qui n’est pas précis, on oublie qu’on a soi-même salué la victoire d’Obama quelques semaines avant, l’élection d’un « Noir » à la Maison Blanche : pas plus précis. Le mot « race » n’est pas précis, il n’est pas scientifique, et d’ailleurs à l’exception de quelques connards exclus du débat public en France, personne ne prétend qu’il l’est. Quand on parle d’une passion, et l’attachement à la « race » (ou parfois son refus) en est une, il est donc important de faire le tri entre les arguments solides et les galéjades. Le mot « race » n’a aucune base scientifique, OK. Mais « je t’aime » non plus, ne repose sur rien de scientifique. « J’ai la tête dans l’cul », « je suis à la bourre », « la flexibilité du droit du travail est un bien », « ami », « peuple » ou « une baguette pas trop cuite s’il vous plait » sont des expressions dont on use quotidiennement SANS QU’ELLES AIENT LE MOINDRE FONDEMENT SCIENTIFIQUE. En fait, n’en déplaise aux adversaires du mot, personne ne prétend à une quelconque scientificité. En face de Zemmour, nous avons même des gens qui arrivent à exiger que le mot « race » ne soit pas prononcé : puisque les races n’existent pas, il ne faut pas en parler. Ça paraît logique, mais on pourrait objecter que l’humanité parle sans cesse de dieu alors qu’il n’existe pas plus. Faut-il interdire qu’on l’évoque ? On parle également de « l’amour » alors que c’est un des concepts les plus imprécis qui soient. On évoque volontiers « l’amitié entre les peuples » dans le flou poétique le plus total, et ça ne gêne personne, etc. Il semble donc clair que dans ce domaine passionnel, la raison et le bon sens aient été massivement écartés du rang des méthodes valables.
« Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots », dit Jean Jaurès en son temps. T’avais raison, Jeannot, et il semble bien qu’on soit ici devant un cas d’école ! Traumatisés à la seule évocation du mot « races », certains en arrivent non seulement à soutenir qu’elles n’existent pas au sens strict mais aussi qu’il n’y a pas de Noirs, de Blancs, de Jaunes. Comme Sartre prétendit que le Juif n’est juif que dans l’œil de celui qui le définit comme Juif, on serait blanc ou noir uniquement selon l’opinion qu’on se fait de vous… Je vous laisse méditer là-dessus. Partant de là, il ne resterait plus qu’à bannir totalement le mot « race » pour que mécaniquement, disparaisse le racisme… riche idée ! (j’ai moi-même essayé de pas prononcer le mot « taxe d’habitation » depuis trois jours : rien à faire, cette garce est toujours là, impayée, menaçante, sur ma table, rappelant les heures les plus sombres de mon portefeuille). Il est évident que quiconque croit à ce simpliste passe-passe quitte instantanément le monde des humains pour s’installer dans celui, plus peuplé, des grosses têtes de nœuds. Mais il faut parler aux têtes de nœuds, même aux grosses. Il faut leur dire que si le mot « race » était universellement remplacé par le mot « phénotype », par exemple, nous assisterions à un développement du phénotypisme, et ça ne changerait rien. A quand une dénonciation des ravages de la mélaninophobie ? Si on arrêtait de prononcer son nom, Eric Zemmour disparaîtrait-il? Croire et soutenir de facto que le racisme n’existe que par amour d’un mot devrait vous interdire l’accès aux émissions de télé, même celles du plus bas niveau.
Pourquoi Zemmour est-il un con ? Parce qu’il préfère provoquer d’autres cons en utilisant des mots-clés dans un rapport frontal plutôt qu’essayer de les amener à reconnaître que tout ça n’a pas beaucoup de sens. Ce metteur de pieds dans le plat tend progressivement à ne plus rien faire d’autre que scandaliser les bien-pensants (qui ne sont pas automatiquement dans l'erreur parce bien-pensants) : exercice limité, petit plaisir fugace qui l’entraîne souvent à avancer des propositions ridicules. C’est dommage parce que, tout con qu’il soit, il n’est pas bête… Et j’espère qu’on aura tous compris que Zemmour n’est pas, loin s’en faut, le seul con dans cette affaire.
En somme, il apparaît bien que le mot « race » répond à un désir de classification (j’écarte de ma conclusion les authentiques racistes, dont Zemmour n’est pas, ceux qui pensent qu’il y a une hiérarchie et qu’ils en occupent le haut) mais qu’il ne classifie rien de bien précis, ni de bien utile.

lundi 1 décembre 2008

Une vive lenteur...

Encore un clip amusant de Michel Gondry. Il vient de sortir, c'est pour "Soleil du soir", de ce bon Dick Annegarn. (mais comment qu'il a fééééé ?!!!)