- Nous retrouvons immédiatement Jean-Michel Traitriz sur la place de la Concorde où, depuis maintenant cinq heures, une foule immense est rassemblée. Jean-Michel, pouvez-vous nous donner des précisions sur les rumeurs folles entendues depuis ce matin ?
- Oui, Gilbert, je peux hélas vous confirmer de façon certaine que des exactions se déroulent ici depuis plusieurs heures, dans une ambiance de kermesse, ce qui renforce encore le sentiment de fin du monde, de fin de la civilisation…
- Soyez plus précis, Jean-Michel, qu’avez-vous vu ?
- J’ai vu la voiture de Chris Viehbacher, le PDG de Sanofi, bloquée par la foule au moment où elle traversait la place. Chris Viehbacher devait se rendre au Ritz pour un petit déjeuner intime avec sa nièce, semble-t-il. On ignore qui a reconnu le PDG du groupe dans cette grosse berline aux vitres teintées. Toujours est-il que le véhicule a été bloqué par des badauds venus ici fêter la prise de la Bastille, et que des cris hostiles ont très vite fait monter la tension.
- Que faisaient les forces de police à ce moment-là ?
- Elles ne faisaient rien puisque rien de particulier n’était signalé. Dans tout Paris, des groupes de taille plus ou moins grande se dirigent vers les lieux principaux où l’on fête le 14 juillet, et la police ne peut pas être partout en nombre à la fois. Les choses sont allées très vite : la voiture a été renversée sur le flanc, Chris Viehbacher et son chauffeur ont été extraits de l’habitacle, ainsi que Nicolas Cartier, le Directeur Général de Sanofi France, qui s’était dissimulé dans la boîte à gants. Sous les gifles, Monsieur Viehbacher a tenté de calmer la foule mais hélas, il n’a pas été compris par le peuple.
- Il parle pourtant le français !
- Tout à fait Gilbert, mais ses mots ne semblaient pas avoir le sens habituel. On a reconnu quelques mots, comme « progrès », « valeur ajoutée » et « ressources humaines », mais la syntaxe, peut-être trop chargée de notions marketing, n’a eu comme effet que de d’amplifier la colère générale.
- C’est insensé !
- Tout à fait Gilbert… J’ai été témoin d’une scène de lynchage atroce, vous avez bien entendu, un lynchage en plein XXIème siècle, place de la Concorde à Paris ! A l’heure où je parle, monsieur Viehbacher est mort. Il a été mis en pièce par la foule et sa tête a été fichée au bout d’une pique.
- On se croit revenu en plein moyen âge !
- Je suis au regret de vous dire que Nicolas Cartier a subi le même sort que son patron. Tout est allé très vite. Après les avoir abondamment giflés, la foule a décapité les deux dirigeants, non sans leur avoir introduit leurs légions d’honneur dans le cul. Puis ce fut le tour du chauffeur, un homme parlant polonais et qui n’a sans doute pas compris ce qui lui arrivait. Il a pourtant su dire quelques mots en français, une formule probablement apprise par cœur, mais qui ne l’a pas sauvé : « sans papier ! sans papier ! » En ce moment sur la place qui fait face à l’Assemblée Nationale, la foule danse en promenant trois piques macabres au son d’un orchestre de reggae !
- Merci Jean-Michel. Nous avons réussi à joindre le ministre du redressement productif, qui réagit à ces événements. Monsieur Montebourg, vous avez la parole.
- Je tiens à exprimer ma solidarité avec les familles de messieurs Viehbacher et Cartier, victimes d’un assassinat qui rappelle les heures les plus sombres de notre histoire.
- La foule se réclame de la Révolution française, dit-on…
- C’est bien ce que je dis ! En ce moment même, les forces de police se mettent en position autour de la place. J’invite tous les parisiens à éviter le secteur de la Concorde et à se rendre en nombre, comme d’habitude si j’ose dire, aux réjouissances du 14 juillet. Plus nous serons nombreux à marquer notre attachement à un 14 juillet festif, citoyen et solidaire, plus nous marquerons notre refus de la violence, de l’injustice et du populisme.
- Monsieur le ministre, pensez-vous que l’annonce de milliers de licenciements par un groupe qui compte ses bénéfices en milliards puisse avoir un rapport avec les faits ?
- Absolument pas. Par ma voix, le gouvernement avait courageusement exprimé son opposition aux décisions de Sanofi. Toute autre action est illégitime au regard des lois de la République, du commerce de la libre concurrence.
- La situation peut-elle changer après ce massacre ?
- Non. Le gouvernement garantit que les décisions du groupe Sanofi seront respectées, et qu’il n’y aura pas de confusion des rôles quant à la gestion de son destin. Nous sommes dans un Etat de droit. Les marchés et les entreprises doivent être rassurés sur ce point !
- A propos du plan de licenciement de 8000 personnes chez PSA, le Président de la République vient d’affirmer que « l’Etat ne laissera pas faire ». Pouvez-vous nous dire comment ?
- Une commission d’experts va être nommée, composée de dirigeants des principales entreprises françaises et d’économistes reconnus, ainsi que de représentants de l’Etat. Elle devra définir les mesures d’accompagnement propres à garantir la pérennité de l’entreprise dans la transparence et le respect de l’autre.
- Formidable ! Les salariés de PSA vont être rassurés de l’apprendre.
- Cette commission sera présidée par Ségolène Royal. Elle devra rendre ses conclusions au début du deuxième semestre 2013. Nous serons très attentifs au respect des délais ! Afin de rassurer encore nos concitoyens, je précise que cette commission respectera une stricte parité hommes - femmes.
- Monsieur le ministre, une dépêche de l’étranger nous apprend que le patron de la banque HSBC vient à son tour d’être lynché par la foule dans les rues de Londres. Ça ne peut pas être un hasard ! Monsieur Stuart Gulliver avait fait parler de lui l’an dernier en annonçant 30 000 licenciements dans le monde, alors que sa banque faisait près de 10 milliards de dollars de bénéfices.
- Je tiens à exprimer mes condoléances à la famille de monsieur Gulliver, qui fut un géant de l’esprit bancaire et qui restera dans l’histoire comme le martyr de la modernité. Si les Anglais ne respectent plus la banque, je ne donne pas cher de la survie de notre système !
- Monsieur le ministre, à l’instant même, une autre dépêche nous apprend que Vladimir Poutine s’est félicité d’apprendre l’épisode de la Concorde… Il précise même que le gouvernement devrait, ce sont ses mots, encourager ses citoyens à « faire le ménage ».
- Monsieur Poutine fait encore une fois preuve de son mépris pour la démocratie et l’esprit d’entreprise. De toute façon, nous n’avons pas de leçon à recevoir d’un homme qui met des milliardaires en prison !
- Merci monsieur le ministre. Il fallait que ce soit dit.
- Oui, Gilbert, je peux hélas vous confirmer de façon certaine que des exactions se déroulent ici depuis plusieurs heures, dans une ambiance de kermesse, ce qui renforce encore le sentiment de fin du monde, de fin de la civilisation…
- Soyez plus précis, Jean-Michel, qu’avez-vous vu ?
- J’ai vu la voiture de Chris Viehbacher, le PDG de Sanofi, bloquée par la foule au moment où elle traversait la place. Chris Viehbacher devait se rendre au Ritz pour un petit déjeuner intime avec sa nièce, semble-t-il. On ignore qui a reconnu le PDG du groupe dans cette grosse berline aux vitres teintées. Toujours est-il que le véhicule a été bloqué par des badauds venus ici fêter la prise de la Bastille, et que des cris hostiles ont très vite fait monter la tension.
- Que faisaient les forces de police à ce moment-là ?
- Elles ne faisaient rien puisque rien de particulier n’était signalé. Dans tout Paris, des groupes de taille plus ou moins grande se dirigent vers les lieux principaux où l’on fête le 14 juillet, et la police ne peut pas être partout en nombre à la fois. Les choses sont allées très vite : la voiture a été renversée sur le flanc, Chris Viehbacher et son chauffeur ont été extraits de l’habitacle, ainsi que Nicolas Cartier, le Directeur Général de Sanofi France, qui s’était dissimulé dans la boîte à gants. Sous les gifles, Monsieur Viehbacher a tenté de calmer la foule mais hélas, il n’a pas été compris par le peuple.
- Il parle pourtant le français !
- Tout à fait Gilbert, mais ses mots ne semblaient pas avoir le sens habituel. On a reconnu quelques mots, comme « progrès », « valeur ajoutée » et « ressources humaines », mais la syntaxe, peut-être trop chargée de notions marketing, n’a eu comme effet que de d’amplifier la colère générale.
- C’est insensé !
- Tout à fait Gilbert… J’ai été témoin d’une scène de lynchage atroce, vous avez bien entendu, un lynchage en plein XXIème siècle, place de la Concorde à Paris ! A l’heure où je parle, monsieur Viehbacher est mort. Il a été mis en pièce par la foule et sa tête a été fichée au bout d’une pique.
- On se croit revenu en plein moyen âge !
- Je suis au regret de vous dire que Nicolas Cartier a subi le même sort que son patron. Tout est allé très vite. Après les avoir abondamment giflés, la foule a décapité les deux dirigeants, non sans leur avoir introduit leurs légions d’honneur dans le cul. Puis ce fut le tour du chauffeur, un homme parlant polonais et qui n’a sans doute pas compris ce qui lui arrivait. Il a pourtant su dire quelques mots en français, une formule probablement apprise par cœur, mais qui ne l’a pas sauvé : « sans papier ! sans papier ! » En ce moment sur la place qui fait face à l’Assemblée Nationale, la foule danse en promenant trois piques macabres au son d’un orchestre de reggae !
- Merci Jean-Michel. Nous avons réussi à joindre le ministre du redressement productif, qui réagit à ces événements. Monsieur Montebourg, vous avez la parole.
- Je tiens à exprimer ma solidarité avec les familles de messieurs Viehbacher et Cartier, victimes d’un assassinat qui rappelle les heures les plus sombres de notre histoire.
- La foule se réclame de la Révolution française, dit-on…
- C’est bien ce que je dis ! En ce moment même, les forces de police se mettent en position autour de la place. J’invite tous les parisiens à éviter le secteur de la Concorde et à se rendre en nombre, comme d’habitude si j’ose dire, aux réjouissances du 14 juillet. Plus nous serons nombreux à marquer notre attachement à un 14 juillet festif, citoyen et solidaire, plus nous marquerons notre refus de la violence, de l’injustice et du populisme.
- Monsieur le ministre, pensez-vous que l’annonce de milliers de licenciements par un groupe qui compte ses bénéfices en milliards puisse avoir un rapport avec les faits ?
- Absolument pas. Par ma voix, le gouvernement avait courageusement exprimé son opposition aux décisions de Sanofi. Toute autre action est illégitime au regard des lois de la République, du commerce de la libre concurrence.
- La situation peut-elle changer après ce massacre ?
- Non. Le gouvernement garantit que les décisions du groupe Sanofi seront respectées, et qu’il n’y aura pas de confusion des rôles quant à la gestion de son destin. Nous sommes dans un Etat de droit. Les marchés et les entreprises doivent être rassurés sur ce point !
- A propos du plan de licenciement de 8000 personnes chez PSA, le Président de la République vient d’affirmer que « l’Etat ne laissera pas faire ». Pouvez-vous nous dire comment ?
- Une commission d’experts va être nommée, composée de dirigeants des principales entreprises françaises et d’économistes reconnus, ainsi que de représentants de l’Etat. Elle devra définir les mesures d’accompagnement propres à garantir la pérennité de l’entreprise dans la transparence et le respect de l’autre.
- Formidable ! Les salariés de PSA vont être rassurés de l’apprendre.
- Cette commission sera présidée par Ségolène Royal. Elle devra rendre ses conclusions au début du deuxième semestre 2013. Nous serons très attentifs au respect des délais ! Afin de rassurer encore nos concitoyens, je précise que cette commission respectera une stricte parité hommes - femmes.
- Monsieur le ministre, une dépêche de l’étranger nous apprend que le patron de la banque HSBC vient à son tour d’être lynché par la foule dans les rues de Londres. Ça ne peut pas être un hasard ! Monsieur Stuart Gulliver avait fait parler de lui l’an dernier en annonçant 30 000 licenciements dans le monde, alors que sa banque faisait près de 10 milliards de dollars de bénéfices.
- Je tiens à exprimer mes condoléances à la famille de monsieur Gulliver, qui fut un géant de l’esprit bancaire et qui restera dans l’histoire comme le martyr de la modernité. Si les Anglais ne respectent plus la banque, je ne donne pas cher de la survie de notre système !
- Monsieur le ministre, à l’instant même, une autre dépêche nous apprend que Vladimir Poutine s’est félicité d’apprendre l’épisode de la Concorde… Il précise même que le gouvernement devrait, ce sont ses mots, encourager ses citoyens à « faire le ménage ».
- Monsieur Poutine fait encore une fois preuve de son mépris pour la démocratie et l’esprit d’entreprise. De toute façon, nous n’avons pas de leçon à recevoir d’un homme qui met des milliardaires en prison !
- Merci monsieur le ministre. Il fallait que ce soit dit.